31 août 2020

Les contours de la neutralité religieuse dans l’entreprise précisés par la Cour de cassation

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Si la question de la liberté religieuse au sein de l’entreprise vise habituellement le port de vêtements, comme le voile islamique, la jurisprudence a pu se prononcer cette fois sur le port d’une barbe considérée comme un signe religieux par l’employeur.

La question a déjà fait mainte fois débat, aussi bien dans les entreprises que dans les prétoires.

Dans le cas d’espèce, un salarié d’une entreprise de sécurité, détaché au Yémen, portait une barbe que l’employeur considérait comme portant à la fois un message religieux et politique. Il a demandé à son salarié de revenir à une barbe d’apparence plus neutre, et devant son refus, a prononcé son licenciement pour faute grave, au motif que cette barbe mettait la mission en danger.

Le salarié a contesté la décision en arguant de son caractère discriminatoire et a obtenu gain de cause devant les juridictions, permettant de rappeler le cadre légal et règlementaire en la matière.

Le Code du travail fournit en matière de restriction à la liberté religieuse, un cadre tripartite :

  • La restriction doit être justifiée par la nature de l’acte à accomplir ;
  • La restriction doit répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante ;
  • La restriction doit être proportionnée au but recherché.

Ces trois conditions doivent être respectées par toute clause d’un règlement intérieur portant atteinte à la liberté religieuse.

 

Une clause de neutralité, notamment, en ce qu’elle interdit le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, doit bien sûr être en conformité avec ces dispositions pour pouvoir être valablement appliquée. Une autre condition est que cette clause soit générale, et indifférenciée, et qu’elle ne s’applique qu’aux salariés en contact avec les clients.

Une clause de neutralité prévoyant une interdiction générale, y compris aux salariés ne rentrant jamais en contact avec la clientèle est à proscrire.

En l’absence de clause, il s’agit pour le juge de vérifier alors si l’employeur avait la possibilité d’imposer des restrictions à la liberté religieuse. Une restriction reste possible, mais seulement si elle est motivée par « une exigence professionnelle essentielle et déterminante », c’est à dire une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d’exercice. Il est interdit que cette restriction ne réponde qu’à un seul souhait des clients, ou autre considérations subjectives.

L’employeur, en l’espèce, n’avait pas démontré le risque que représentait le port de la barbe dans le cadre de la mission confié. Mais la solution dégagée par la Cour est basée sur les circonstances particulières de ce litige, si bien que dans des circonstances différentes, la même interdiction sera accueillie par les juges et considérée comme légitime.

Dans le cas d’un salarié travaillant sur des chantiers de démantèlement de matériaux nucléaires, le port de la barbe a pu être interdit, et le salarié sanctionné. Dans ce cas précis, la barbe empêchait l’étanchéité du masque de sécurité.

Si votre entreprise souhaite mettre en place une clause de neutralité, ou s’interroge sur les possibilités de limiter le port de signes religieux portant atteinte à la sécurité de ses salariés, le Cabinet VAUBAN AVOCATS se tient prêt à vous accompagner dans la mise à jour de votre règlement intérieur.

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