30 mars 2022

Licenciement pour faute grave tardif

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Un employeur peut licencier un salarié pour une faute simple, une faute grave ou une faute lourde à la fin d’une procédure disciplinaire. Les conséquences ne sont pas les mêmes suivant la procédure engagée.

La procédure de licenciement pour faute grave doit être, en principe, mise en oeuvre rapidement par l’employeur.

Mais qu’en est-il lorsque l’employeur laisse écouler du temps entre la révélation des faits commis par son salarié et l’engagement de la procédure de licenciement pour faute grave ?

La « gravité » de la faute peut-elle être toujours appréciée?

Licenciement pour faute grave

Le principe du licenciement pour faute grave

Le licenciement pour faute grave est une sanction disciplinaire qui met fin au contrat de travail du salarié, sans préavis ni indemnités.

Il est prononcé lorsque le salarié commet une faute qui rend impossible son maintien dans l’entreprise.

Qu'est-ce qu'une faute grave ?

La faute grave est une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.

Il s’agit d’un motif réel et sérieux de licenciement dont la charge de la preuve appartient à l’employeur.

Je constate une faute grave, dans quel délai je dois engager une procédure de licenciement ?

La faute grave implique une réaction immédiate de l’employeur qui doit engager la procédure de licenciement dans un délai restreint, dès lors qu’il a connaissance des fautes et qu’aucune vérification n’est nécessaire.

Dès lors, l’engagement tardif d’une procédure de licenciement après la connaissance des faits fautifs par l’employeur est susceptible de le priver du droit d’invoquer la faute grave.

Licenciement pour faute grave tardif justifié par l'absence du salarié

L'arrêt de la Cour de cassation du 9 mars 2022

Par un arrêt du 9 mars 2022, la Cour de cassation est venue préciser que le fait pour l’employeur de laisser s’écouler un délai entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure de licenciement ne peut avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravitédès lors que le salarié, dont le contrat de travail est suspendu, est absent de l’entreprise.

En l’espèce, une salariée, employée depuis 1982, est placée en arrêt maladie à compter du 31 mai 2013 jusqu’au 7 juin 2013. L’arrêt a ensuite été prorogé consécutivement et sans interruption 9 fois pour se terminer le 15 mars 2014.

Son employeur l’a convoqué à un entretien préalable, par correspondance du 14 novembre 2014, lui reprochant des fautes commises en 2011 et 2012.

La salariée a été licenciée pour faute grave, suivant courrier du 12 décembre 2014, soit 2 ans après les faits. L’employeur évoquait n’avoir eu connaissance des faits reprochés à sa salariés que le 17 octobre 2014 lors d’un entretien avec l’une des clientes de l’entreprise.

La salariée a constesté son licenciement devant le Conseil des prud’hommes en soutenant que la procécure aurait été mise en œuvre tardivement (4 semaines après la connaissance des faits fautifs) privant ainsi son employeur de la possibilité d’invoquer une faute grave.

La position de la Cour de cassation

Saisie du litige, la Cour d’appel de DIJON a débouté la salariée de ses demandes indemnitaires et a considéré que le licenciement reposait bien sur une faute grave, malgré la tardiveté du délai d’engagement de la procédure.

La Haute juridiction approuve les juges d’appel d’avoir considéré que, dans la mesure où la salariée était toujours en arrêt maladie, et donc absente de l’entreprise, l’écoulement de ce délai ne pouvait avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité.

Ce qu'il faut retenir

La faute grave prive le salarié de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité compensatrice de préavis.

Lorsque l’employeur prend connaissance d’un comportement répréhensible, il a deux mois pour engager des poursuites disciplinaires.

En principe, la procédure de licenciement pour faute grave doit être entamer dans un « délai restreint » à partir du moment où il a eu connaissance des faits.

Ce « délai restreint » est apprécié discrétionnairement par les Juges.

L’arrêt de la Cour de cassation du 9 mars 2022 introduit une nouvelle exception à ce principe en précisant que si le salarié est absent pendant une suspension de son contrat, un retard dans l’engement de la procédure de licenciement pour faute n’ôte pas le caractère « grave » de la faute.

Notre conseil

Si vous découvrez que l’un de vos salariés a commis une faute grave, et même si cette découverte arrive tardivement après la commission des faits, vous pouvez toujours engager une procécure de licenciement pour faute grave.

Cependant, en cas de contestation, vous devrez être en mesure d’expliquer les raisons de ce retard.

Maître Geneviève PIATavocate spécialisée en droit du travail, reste à votre disposition pour accompagner votre entreprise dans le cadre de ses procédures disciplinaires ou pour toute précision complémentaire sur cet arrêt.

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