15 février 2023

Conditions suspensives d’obtention de prêt

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Conditions suspensives d'obtention de prêt

La Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 14 décembre 2022, que l’indication d’un montant maximal du prêt dans le compromis de vente ne contraignait pas les acquéreurs à accepter toute offre d’un montant inférieur dès lors que la demande de prêt, conforme au compromis de vente, avait été refusée par la banque qui n’était prête à financer qu’à un montant inférieur.

Que s'est-il passé ?

Un couple d’acquéreurs s’est engagé à acheter un appartement au prix de 386.000 € et a régularisé un compromis de vente contenant une condition suspensive d’obtention du prêt suivant les modalités suivantes : montant maximum de 414.000 € sur une durée de 25 ans au taux maximal de 2 %.

Les acquéreurs ont saisi un courtier lequel n’a pu leur obtenir qu’un prêt de 407.000 €.

N’ayant pas la possibilité de verser les 7.000 € manquants, par un apport personnel, les acquéreurs ont choisi de renoncer à leur projet d’achat.

Sous l’impulsion de l’agent immobilier, souhaitant tout de même être payé de sa commission, le tribunal a été saisi pour statuer sur les conséquences de l’obtention d’un prêt à un montant inférieur au maximum fixé par la condition suspensive d’obtention de prêt du compromis.

Les acquéreurs demandaient la restitution de l’indemnité d’immobilisation de 10.000 € versée au Notaire et le vendeur le paiement de l’indemnité d’immobilisation convenue à hauteur de 38.600 €.

La position des juges du fond et de la Cour d'appel

Le Tribunal Judiciaire a fait droit aux demandes du vendeur et a condamné les acquéreurs à lui payer l’indemnité d’immobilisation de 38.600 €.

Les acquéreurs ont saisi la cour d’appel.

La Cour d’Appel a jugé que les acquéreurs n’étaient pas tenus d’accepter une offre à un montant inférieur au maximum fixé par le compromis de vente dès lors que le courtier des acquéreurs avait bien formulé une demande de prêt à hauteur de 414.000 €, comme l’exigeait le compromis de vente.

Le vendeur a porté cette affaire devant la Cour de cassation.

Obtenir un prêt inférieur au montant maximal prévu dans les conditions suspensives est conforme

Tout comme la Cour d’appel, la Cour de cassation a jugé que l’indication d’un montant maximal du prêt dans le compromis de vente ne contraignait pas les acquéreurs à accepter toute offre d’un montant inférieur dès lors que la demande de prêt, conforme au compromis de vente, avait été refusée par la banque qui n’était prête à financer qu’à un montant inférieur.

Le compromis de vente est caduc puisque la défaillance de la condition suspensive n’est pas imputable à une faute des acquéreurs mais à la banque.

Les acquéreurs n’ont pas été obligés de verser l’indemnité d’immobilisation de 38.600 € et ont pu récupérer les 10.000 € qu’ils avaient séquestrés chez le notaire.

Un arrêt en adéquation avec des décisions antérieures

Cette décision vient compléter un précédent arrêt de la Cour de cassation du 14 janvier 2021 dans lequel c’était le vendeur, et non les acquéreurs, qui avait renoncé à vendre son bien immobilier.

A la date fixée pour signer la vente chez le Notaire, les acquéreurs n’avaient obtenu de la banque qu’une offre de prêt à un montant de 539.900 € alors que la condition suspensive d’obtention d’un prêt portait sur un montant maximum de 856.000 €.

Un mois après avoir dépassé la date de signature chez le notaire, les acquéreurs avaient réussi à obtenir la totalité du prêt et avait versé la totalité du prix au notaire.

Les acquéreurs avaient saisi le tribunal pour contraindre le vendeur à leur vendre le bien immobilier.

Le Tribunal, puis la Cour d’Appel, ont jugé que le vendeur pouvait renoncer à la vente de son bien immobilier si, dans le délai de la condition suspensive d’obtention de prêt, les acquéreurs n’avaient pas obtenu la totalité du prêt demandé.

Les acquéreurs ont porté cette affaire devant la Cour de cassation.

La Cour de cassation a jugé que l’offre de prêt de la banque, à un montant inférieur au montant maximum fixé par la condition suspensive d’obtention de prêt, est conforme au compromis de vente conclu entre le vendeur et l’acquéreur.

Les acquéreurs étaient libres d’acheter le bien immobilier ou de bénéficier du paiement de la pénalité fixée par le compromis dans le cas où le vendeur ne souhaitait plus vendre.

Le vendeur, quant à lui, ne pouvait pas renoncer à vendre son bien.

Une protection de l'acquéreur qui contracte dans son intérêt exclusif

Contraires en apparence, ces deux décisions vont dans le même sens : celui de protéger la partie qui contracte une condition suspensive dans son intérêt exclusif.

Ainsi, l’acquéreur qui prend le soin d’insérer une condition suspensive d’obtention de prêt dans son compromis de vente, indiquant un montant maximal de prêt, est le seul à pouvoir choisir, si le prêt ne lui est pas accordé ou si le prêt lui est accordé mais à un montant inférieur, s’il poursuit la vente ou s’il y renonce.

Le vendeur lui ne peut pas profiter de cette situation où l’acquéreur détient une offre de prêt à un montant inférieur à celui fixé par la condition suspensive pour renoncer à vendre son bien immobilier.

Comment modifier la rédaction mes conditions suspensives d’obtention de prêt ?

Alors que l’indication d’un montant maximal dans la condition suspensive d’obtention de prêt profite à l’acquéreur, le vendeur et l’agent immobilier auront un véritable intérêt à modifier la rédaction de leur clause afin de sécuriser la vente et d’éviter la mauvaise foi de l’acquéreur qui serait tenté de justifier d’un accord de prêt de la banque un montant inférieur pour sortir de la vente sans pénalité.

La modification de la rédaction peut ainsi prendre plusieurs formes.

Tout d’abord en supprimant le terme « maximum » au profit d’une fourchette de prêt contraignante pour l’acquéreur, ou bien, en remplaçant le montant « maximum » par un montant « minium ».

Ce peut être également en conservant un montant « maximum » tout en ajoutant la faculté pour le vendeur de renoncer à vendre son bien si l’acquéreur obtient un prêt à un montant inférieur à celui indiqué aux termes de la condition suspensive d’obtention de prêt.

La modification de la rédaction aura cependant un impact sur le reste des clauses du compromis de vente.

Il faudra donc veiller à ce que cette modification ne vienne pas contrarier d’autres clauses et procéder à une vérification de la validité du compromis de vente après la modification de sa rédaction.

Maître Céline André et son équipe restent à votre disposition pour toute information complémentaire.

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