3 février 2023

Forfait jours et convention du commerce de détail non alimentaire

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Forfait jours : la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires invalidée par la Cour de cassation

Dans un arrêt du 14 décembre 2022 (nº 20-20.572), la Cour de cassation a considéré que l’article 3.2.1. de l’accord du 5 septembre 2003, attaché à la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires du 9 mai 2012, n’était pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail des salariés en forfait-jours restent raisonnables.

En conséquence, la convention individuelle de forfait jours conclue par le salarié en application de cet accord encourait la nullité, ouvrant alors la voie à l’application du régime des heures supplémentaires.

Forfait jours et convention du commerce de détail non alimentaire

En quoi consiste le forfait jours ?

Le forfait annuel en jours est un dispositif qui permet de comptabiliser le temps de travail en fonction d’un nombre de jours (ou demi-journées) travaillés sur l’année, plutôt qu’en heures.

Les salariés concernés peuvent ainsi organiser leur emploi du temps et leur rémunération est basée sur le nombre de jours travaillés, et non sur le volume horaire.

Les règles en matière de forfait jours

Cet arrêt est l’occasion de rappeler que le forfait jours doit être nécessairement encadré par un certain nombre de garanties permettant à l’employeur d’assurer un suivi réel et régulier du temps du travail.

L’autonomie dont bénéficie le salarié en forfait jours n’est pas exclusive d’un contrôle de l’employeur afin que ce dernier puisse immédiatement réagir en cas de surcharge de travail.

Pour rappel, la conclusion d’une convention individuelle de forfait jours nécessite que ce dispositif soit prévu par un accord collectif dont les dispositions assurent la garantie du respect des durées raisonnables de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.

Pour ce faire, il est nécessaire d’instituer un « suivi effectif et régulier permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable ».

Lire également notre article : Comment fonctionne le forfait jours ?

Forfait jours : vérifiez la conformité de vos accords collectifs

C’est à travers cette exigence que la Haute juridiction analyse habituellement la conformité des accords collectifs en matière de forfait jours et qu’elle a déjà invalidité plusieurs conventions collectives de branche pour défaut de garanties suffisantes (tel est le cas des Industries Chimiques par exemple).

C’est au tour de la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires d’être retoquée par la Cour de cassation qui relève qu’elle n’est pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié.

Elle étaye sa décision en relevant que les dispositions litigieuses se bornent à prévoir que :

  • Le décompte des journées travaillées ou des jours de repos pris est établi mensuellement par l’intéressé ;
  • Les cadres concernés doivent remettre, une fois par mois à l’employeur qui le valide, un document récapitulant le nombre de jours déjà travaillés, le nombre de jours ou de demi-jours de repos pris et ceux restant à prendre ;
  • A cette occasion, doit s’opérer le suivi de l’organisation du travail, le contrôle de l’application du présent accord et de l’impact de la charge de travail sur leur activité de la journée ;
  • Le contrôle des jours sera effectué soit au moyen d’un système automatisé, soit d’un document auto-déclaratif et que dans ce cas, le document signé par le salarié et par l’employeur est conservé par ce dernier pendant trois ans et tenu à la disposition de l’inspecteur du travail.

Pour la Cour de cassation, ces garanties sont insuffisantes car elles ne permettant pas « de suivi effectif et régulier permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable ».

Une décision n'ayant pas vocation à perdurer dans le temps

Cette décision aura cependant une portée limitée dans le temps puisqu’un avenant du 3 mai 2022 à la CCN de détail non alimentaires, pour l’heure non étendu, ajoute un ensemble de garanties supplémentaires (planning prévisionnel établi par le salarié, deux entretiens annuels afin d’évoquer notamment la charge de travail, un dispositif d’alerte en cas de surcharge de travail, un suivi de l’activité réelle du salarié régulier et au moins une fois par trimestre, le document de contrôle faisant apparaître, notamment, le nombre et la date des jours ou demi-journées travaillés ainsi que des jours ou demi-journées de repos complémentaires…).

Maître Geneviève Piat et son équipe restent à votre disposition pour toute précision complémentaire.

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