Dans cette affaire « a été jugé fautif le débauchage de 16 salariés d’une société sur 400 dès lors qu’il a entraîné une désorganisation effective dans l’exercice concret de l’activité, même si les effets de cette désorganisation étaient plus limités que ce qui était allégué. »
Une société reproche à son ancien directeur général d’avoir participé à la création d’un groupe de sociétés concurrentes et d’avoir contribué au débauchage de salariés qualifiés. La société a donc assigné les sociétés de ce groupe et l’ancien directeur en paiement de dommages-intêrets en réparation d’actes de concurrence déloyale par débauchage fautif.
Les défendeurs ont soutenu que leur comportement n’est pas fautif puisque le nombre de salariés débauchés est faible et que la société demanderesse a connu ensuite une croissance exponentielle.
Ces arguments ont été rejetés par la Cour d’appel, puis par la Cour de cassation.
En effet, la Cour a jugé que le débauchage déloyal de salariés avait bien entraîné une désorganisation effective dans l’exercice concret de l’activité de la société ayant subi ce débauchage.
Plus précisément, la Cour a jugé que les départs à la concurrence de 3 cadres dirigeants avaient nécessairement désorganisé la société du fait du niveau de responsabilité et de qualification de ces personnes et du fait que les démissions s’étaient ensuite multipliés après le départ du directeur général, pour atteindre le nombre de 16 sur un total de 400 salariés.
En outre, la Cour précise que les comptes de la société révélaient que ce débauchage fautif avait eu un impact financier (relation directe entre la capacité de la société à recruter du personnel et le volume d’activité qu’elle peut réaliser). La société a également dû souscrire un contrat de mise à disposition du personnel pour assurer certaines activités et combler la perte de salariés.
Le fait que les effets de la désorganisation étaient plus faibles que ceux allégués par la société, conduits seulement à l’octroi de dommages-intérêts inférieurs à ceux réclamés.
A noter que la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger que « la preuve concrète de la désorganisation est exigée et le fait que les salariés débauchés occupaient des postes stratégiques ne suffit pas à cette démonstration » (Cass. com. 20-9-2016).
Cass. com. 22-6-2022 n° 20-20.768 F-D, P. c/ Sté Sferis