16 janvier 2023

Covid 19 : Les locataires doivent payer leurs loyers commerciaux

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La Cour de cassation réaffirme l’obligation pour les locataires d’avoir à payer leurs loyers commerciaux

Dans le prolongement de ses arrêts du 30 juin 2022 (cf. notre actualité du 29 juillet 2022), la Cour de cassation a réaffirmé l’obligation pour les preneurs de locaux commerciaux d’avoir à régler leur loyer malgré les restrictions instaurées durant la crise sanitaire du COVID-19.

Des propriétaires de lots de résidences de tourisme (en l’espèce Odalys et Résid’études) ont assigné en référé les exploitants qui leurs louaient pour obtenir une provision à valoir sur le montant des loyers impayés.

Sur l’absence de manquement du bailleur à son obligatoire de faire jouir paisiblement le preneur des locaux pendant toute la durée du bail

Ces locataires exploitants qui avait notifié à leur propriétaire qu’ils suspendaient le règlement de leurs loyers, soutenait que ces loyers n’étaient pas dus en raison de l’impossibilité de jouir des locaux loués, en méconnaissance de l’article 1719 du code civil qui oblige le bailleur de « faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ».

Or, la Cour de cassation dans deux arrêts du 23 novembre 2022 confirme le raisonnement de ses arrêts-pilote du 30 juin 2022 (n°21-19.889, n°21-20.127 et n°21-20.190) en faveur des bailleurs et la condamnation par les cours d’appel saisies des litiges, des locataires à payer leurs loyers pendant la période de confinement résultant de la crise sanitaire du COVID-19, considérant :

  • D’une part que l’effet des mesures générales et temporaires était sans lien direct avec la destination contractuelle du loyer, de sorte que ces restrictions n’étaient pas imputables aux bailleurs et que ces derniers n’avaient donc pas commis de manquement à leur obligation de délivrance.

    Elle précise ainsi dans la première espèce (pourvoi n°21-21.867) que « seuls les exploitants se sont vu interdire de recevoir leurs clients pour des raisons étrangères aux locaux loués qui n’avaient subi aucun changement, la cour d’appel a retenu, à bon droit, que les mesures d’interdiction d’exploitation, qui ne sont ni du fait ni de la faute du bailleur, ne constituent pas une circonstance affectant le bien, emportant perte de la chose louée. »
  • D’autre part, ces mesures ne pouvaient être considérées comme entraînant la perte de la chose au sens de l’article 1722 du code civil, même d’un point de vue juridique. L’article 1722 du code civil dispose que : « Si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail ».

    Or, la Cour de cassation retient que la perte était, en effet, seulement provisoire tandis que le code civil vise une destruction définitive de la chose louée et qu’aucun lien direct ne pouvait être fait entre l’interdiction de recevoir du public et la destination contractuelle du local loué.

Sur l’inapplicabilité des clauses de suspension des loyers en l’absence de faute du bailleur et au regard du caractère général et indifférencié des restrictions résultant de la crise sanitaire du COVID-19

Les locataires excipaient un autre argument : celui de l’applicabilité des clauses de suspension du loyer existant dans leur baux.

Là encore, la Cour de cassation a approuvé les juges des référés d’avoir considéré les clauses comme suffisamment claires pour pouvoir les écarter. Pour juger comme non applicable ces clauses, les juges du Quai de l’Horloge soulignent que celles-ci étaient uniquement mobilisables si la suspension résultait des agissements du bailleur et que tel n’était pas le cas en l’espèce manifestement.

Elle indiquait ainsi dans la seconde espèce (pourvoi n°22-12.753) que : « la clause précise de suspension du loyer prévue au bail ne pouvait recevoir application que dans les cas où le bien était indisponible soit par le fait ou la faute du bailleur, soit en raison de désordres de nature décennale ou de la survenance de circonstances exceptionnelles affectant le bien loué lui-même, d’autre part, que la locataire ne caractérisait pas en quoi les mesures prises pendant la crise sanitaire constituaient une circonstance affectant le bien, la cour d’appel, qui n’a pas interprété le contrat, n’a pu qu’en déduire que l’obligation de payer le loyer n’était pas sérieusement contestable. »

Les arguments ainsi soulevés par les locataires desdits baux commerciaux ne constituent pas une contestation sérieuse permettant de faire obstacle à leur condamnation par le juge des référés d’avoir à régler leur loyer par provision.

Ces arrêts sont une nouvelle fois l’occasion de clarifier le contentieux du bail commercial dans le cadre de la crise sanitaire du COVID-19.

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