15 mai 2023

Cession du droit au bail en matière de procédure collective : le bailleur peut-il se prévaloir de la clause d’agrément pour y faire échec ?

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En cas de vente de gré à gré du bail commercial, le liquidateur doit respecter l’ensemble des clauses du contrat.

Le bailleur peut donc se prévaloir des clauses d’agrément pour faire échec à la cession.

cession du droit au bail et procédure collective

Cession du droit au bail dans le cadre d’une procédure collective : le principe

En cas de liquidation judiciaire, les contrats sont en principe poursuivis par le liquidateur, et notamment le bail, l’objectif étant de pouvoir poursuivre les activités et payer les créanciers.

Cependant, souvent, la cession s’impose.

Il peut s’agir d’une cession totale de l’entreprise, dans le cadre d’un plan de cession (L.642-1 et s. du code de commerce). Mais les actifs de l’entreprise peuvent également être cédés isolément (L.642-18 s.), tels que bail commercial.

Lorsque la cession est totale, et pour favoriser une telle opération dans l’intérêt des créanciers, le code de commerce vient neutraliser certaines clauses, et notamment les clauses d’agrément ou de solidarité entre le cédant et le repreneur.

La jurisprudence prévoit de longue date en effet, que les clauses du bail restreignant la cession de celui-ci ne sont pas applicables : par exemple, la clause d’agrément ne joue pas, et il n’est pas possible d’exiger le formalisme prévu au bail qui imposerait la cession par acte notarié.

En revanche, lorsque la cession est isolée, hors d’un plan de cession, alors l’intégralité des clauses contractuelles du bail devront être respectées (sauf clause de solidarité).

Que s’est-il passé ?

Le bailleur d’une société placée en liquidation judiciaire n’étant pas réglé depuis l’ouverture de la procédure collective avait délivré un commandement de payer les loyers postérieurs puis sollicité la résiliation du bail.

Parallèlement, le liquidateur avait saisi le juge-commissaire aux fins de se voir autoriser à procéder à la cession de gré à gré du fonds de commerce, comprenant le droit au bail.

Malgré l’opposition du bailleur, invoquant une clause du bail nécessitant son agrément pour tout transfert du bail, le juge y avait fait droit.

La Cour d’appel de Paris donne également raison au liquidateur, estimant que la clause du bail ne s’appliquait pas en cas de cession de fonds de commerce.

La cession du droit au bail doit respecter les conditions prévues à la date du jugement d’ouverture

Dans son arrêt du 19 avril 2023, la Cour de cassation censure cette décision et clarifie, par là même, le régime applicable en cas de cession de gré à gré, hors plan de cession.

Selon la Cour de cassation, la cession du droit au bail, qu’elle soit isolée ou incluse dans la cession du fonds de commerce, doit respecter les conditions prévues par le contrat à la date du jugement d’ouverture.

Par le présent arrêt, la Cour de cassation confirme que l’ensemble des clauses s’appliquent, et notamment la clause d’agrément qui serait prévue dans le bail, et dont le bailleur peut se prévaloir.

Ce rappel impose donc au liquidateur d’être particulièrement attentif à la rédaction du bail et prévoir des conditions suspensives à lever et/ou négocier avec le bailleur pour faire agréer le repreneur.

Notre cabinet reste à votre disposition pour vous accompagner et vous éclairer à ce sujet.

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